Le mentorat focus d’une vie de leader ! 

Le docteur Martin Sanders est décédé le 2 janvier 2024. Je veux rendre hommage à ce frère d’influence qui a été un ami, un mentor, qui m’a accordé de vraies permissions (1).Je suis reconnaissant à Dieu pour cet exemple. Voici sa vision du mentorat résumée par quelques extraits du livre que nous avons coécrit : Multiplier les leaders.

Une vision claire

La mission donnée par Jésus consiste à faire des disciples, eux-mêmes disposés et capables d’en faire d’autres. Je pense que le mentorat est la solution pour les églises désireuses de suivre les enseignements du maître. Il est vraiment temps de le comprendre une fois pour toutes! Dans ce domaine, le besoin est incroyablement immense. En effet, quels que soient les pays, le nombre de mentors capables et déterminés est incroyablement faible. J’espère que ce livre pourra changer la situation. 

Un besoin actuel évident

Des responsables plus âgés que moi me demandent souvent : « Pourquoi les jeunes leaders éprouvent-ils le besoin si pressant d’avoir un mentor? Personne n’a joué ce rôle pour nous et nous nous sommes bien débrouillés seuls. Non ? » 

Depuis la Seconde Guerre mondiale, notre société a évolué à une vitesse qu’aucune période de l’Histoire n’a jamais connue. Pendant les trente dernières années du xxe siècle, le rythme des changements semble même s’être accéléré. Certains responsables expérimentés le reconnaissent. Beaucoup d’autres, cependant, ne prennent pas le temps d’y réfléchir. Ces modifications ont pourtant fait apparaître toutes sortes d’individus très différents, avec des besoins et perspectives spécifiques. 

Cinq facteurs culturels ont renforcé le besoin de recourir a un mentorat intentionnel : 

  1. La disparition des héros

Depuis plus de dix ans, les grands périodiques consacrent régulièrement leur couverture à l’absence de héros et de modèles. Ils parlent des conséquences de cette disparition sur la société et, en particulier, sur les jeunes. 

2. La perte du « bon sens » 

Pendant les soixante premières années du xxe siècle, il existait un ensemble de connaissances et de valeurs communes que l’on appelait simple- ment « bon sens ». Au début des années 2000, ces notions se sont progressivement estompées. Cette absence de connaissances partagées rend nécessaire le développement d’un langage commun: le mentor doit fournir une perspective et expliquer le pourquoi des choses. Dans les organisations comme dans les relations. 

3. Mobilité sociétale

Dans toutes mes conférences pour jeunes responsables, je demande aux participants de lever la main s’ils habitent dans un rayon de 150 km du lieu où ils ont grandi. Fréquemment, personne ne se manifeste. Au mieux, seul un quart de la salle lève la main. Quand un jeune leader n’a plus immédiatement accès aux gens, aux lieux et aux institutions qu’il a connus, le désir et le besoin de mentor s’accentuent. 

4. Priorité à l’image

Une personne qui grandit en regardant des clips vidéo sera très différente d’une personne qui grandit en écoutant de la musique. Cette dernière peut, en entendant une de ses chansons préférées, voir surgir des souvenirs d’une époque particulière de son existence et repenser à un lieu, à des vêtements, à une voiture, à des amis, etc. Cela l’amène, l’espace d’un instant, à réfléchir à propos de sa vie. Quelqu’un qui a grandi en regardant des clips se souviendra plutôt des images du clip. Comme les images lui ont déjà été fournies, il lui est difficile – voire impossible – d’avoir une réflexion très approfondie sur sa vie. 

5. Une maturité retardée 

La perception du temps et de l’âge évolue aussi. Dans les années soixante, un slogan pro- clamait: «Vous ne pouvez pas faire confiance à quelqu’un de plus de trente ans ». Les magazines féminins ont ensuite annoncé que la quarantaine était la nouvelle trentaine. À présent, les baby-boomers ayant vieilli, la cinquantaine est devenue la nouvelle quarantaine. Il y a vingt ans, les formations pour jeunes dirigeants visaient essentiellement les personnes d’une vingtaine ou d’une petite trentaine d’années. Aujourd’hui, les inscriptions s’étendent facilement aux personnes de quarante à quarante-cinq ans. Une maturité retardée accroît aussi bien le besoin que le désir d’être suivi par un mentor. 

Ces cinq facteurs semblent anodins mais leur combinaison a modifié la donne. Les leaders de la jeune génération ont grandi dans un environnement totalement différent de celui des leaders âgés aujourd’hui d’une cinquantaine ou d’une soixantaine d’années. Comme ils manquent de stabilité familiale, d’une moralité commune et de cadres, les individus eux-mêmes sont très différents. Leurs besoins, leurs valeurs, leurs points de vue et leurs idées se distinguent nettement de ceux de leurs aînés. Le but du mentorat est d’établir des relations intentionnelles qui aident la personne accompagnée à développer sa propre efficacité. Le moyen d’y parvenir consiste à satisfaire les besoins que les facteurs mentionnés ci-dessus ont créés dans notre société. 

L’importance du mentorat 

Dans le contexte du mentorat, le mentor occupe une place importante dans la vie de celui qui est accompagné. Plusieurs personnes ressources peuvent l’aider à atteindre l’efficacité maximale. Le rôle du mentor diffère de la fonction de coach, de guide spirituel, de parent, de conseiller ou d’ami fidèle. Il couvre cependant une partie de chacune de ces fonctions. 

Le rôle du mentor consiste…

…dès le départ, à aider l’autre à atteindre son plein potentiel. 

Prenons l’exemple du foot en guise de comparaison. Les équipes sérieuses disposent d’un coach qui suit les gardiens de buts: il observe chacun individuellement et lui signale les bons et les mauvais gestes. Les joueurs sont souvent mieux rémunérés – parfois dix ou vingt fois plus – que leur entraîneur. Pourtant, même les sportifs multimillionnaires ont besoin que quelqu’un se tienne près d’eux pendant des heures pour les regarder attraper le ballon. Le coach émet ce genre de remarques : « Tu te laisses tomber trop tôt », « Reste toujours face au ballon », « Pense à prendre plus rapidement tes appuis », « Quand ce type de coup franc a lieu, prévois de réagir une fraction de seconde plus tôt ». 

Les joueurs ont besoin de l’entraîneur, non pour les aider à réceptionner le ballon, mais pour qu’ils puissent le réceptionner mieux, plus vite, plus souvent. Il est probable que le coach n’ait jamais été aussi bon gardien que celui qu’il conseille. Il a cependant appris, grâce à l’expérience, aux milliers de joueurs qu’il a observés et aux jeux vus et revus tout au long de sa vie. Il est passé maître dans l’art de distinguer les nuances de ce sport, en particulier en matière de réception. 

Les parallèles avec le mentorat sont évidents. Ce dont beaucoup de responsables en devenir ont besoin, c’est quelqu’un qui se tienne à leurs côtés pour les suivre et pour leur dire : «Réfléchis à ceci», «Pense à cela», «N’as-tu jamais remarqué que, lorsque ceci se produit, tu réagis de telle façon ? » Ils ont besoin d’un coach qui les interroge, qui va au-delà des conseils et qui les aide à réfléchir à la manière d’améliorer ce qu’ils font. Pour qu’ils puissent atteindre leur niveau le plus élevé, il faut que leur mentor leur pose des questions-clés. Il doit leur fournir quelques indications, être présent dans les moments importants. C’est un confident, capable d’écouter. 

Une prise de conscience essentielle

Proche de la quarantaine, j’ai assisté à une conférence nationale d’églises. Au beau milieu de cette rencontre, un déclic incroyable s’est fait en moi : j’ai réalisé que je n’étais plus l’un de ces « jeunes gars à l’esprit vif ». Cela a été très clair lorsque des jeunes sont venus m’interroger. Le genre de questions que l’on pose à un mentor! Sans l’ombre d’un doute, ils voyaient en moi un des « responsables d’un certain âge » ! Je dois admettre que j’ai connu, pendant une courte période, une petite crise d’identité : Oh non ! Je ne suis plus l’un de ces jeunes types à l’esprit vif. Que vais-je faire maintenant ? 

J’ai pris le temps de me promener un après-midi pour penser et méditer. Je me suis dit: Bon… Comme jeune gars à l’esprit vif, j’ai eu un bon et long parcours. Autour de mes vingt-cinq ans, j’ai bénéficié d’une certaine reconnaissance et d’une influence au-delà de mon église locale. J’ai eu l’occasion de voyager, de beaucoup parler et d’intervenir comme consultant en de nombreux endroits. 

Une décision capitale

Poursuivant mon monologue intérieur, j’ai décidé : OK. J’ai eu un bon parcours. Il est temps à présent de faire la transition pour devenir l’un de ces vieux routiers qui se tient à disposition comme coach, mentor et référent des jeunes hommes et jeunes femmes actifs dans le ministère. À la fin de l’après-midi, j’étais en phase avec cette perspective et je la considérais comme étant la prochaine étape de ma mission. J’étais devenu un vieux routier, parvenu aux plus belles années charnières de sa vie et de son ministère. […] J’ai aussi prié: «Seigneur, puis-je me développer de manière à avoir le cœur, l’esprit et le caractère d’un homme de sagesse ? » 

Conclusion

Nous avons besoin de la sagesse et de l’expérience de nos anciens pour forger notre caractère et encadrer notre développement. Nous avons besoin de nos mentors pour tirer des principes de nos expériences, de nos échecs et de nos frustrations. Pour être disposés à les partager dans une structure relationnelle. Leur sagesse est si précieuse, nous ne pouvons la trouver nulle part ailleurs. Tirons parti de leur discernement et utilisons-le pour croître. Nous avons besoin de ces leaders dans l’Église. Que Dieu nous montre comment devenir des hommes et des femmes avisés, capables de transmettre nos qualités à la génération suivante, qui les transmettra à la suivante, et ainsi de suite !

Autres article de Martin Sanders :

Le caractère légitime le (la) leader spirituel

Comment puis-je trouver un mentor ? 

Pourquoi les ainés hésitent-ils à être mentors ?

(1) Le pouvoir de la permission

Extraits de Multiplier les leaders, pages 47 et suivantes.

Avec l’aimable autorisation de BLF Editions

Retour en haut