Le quatrième congrès du Mouvement de Lausanne, qui se tiendra dans quelques jours, a pour thème : « Qu’ensemble l’Église proclame et mette en évident le Christ ! » Pourtant, le Mouvement de Lausanne s’est construit sur un différent théologique ! Que se passe-t-il lorsque deux leaders les plus influents du 20e siècle ne s’entendent pas sur une question cruciale ? C’est ce qui est arrivé à John Stott et Billy Graham au milieu des années 1970. Un rappel historique donne une perspective intéressante pour gérer les désaccords théologiques entre leaders : l’humilité ! Alors qu’il existe des tensions dans le monde évangélique francophone !
Quand John Stott a affronté Billy Graham
D’après un article de Trevin Wax.
1974 : 2500 évangéliques de 150 pays et 135 dénominations sont réunis à Lausanne, en Suisse, pour le Congrès international sur l’évangélisation mondiale. L’objectif du congrès est de mobiliser les évangélistes pour terminer la tâche, et que l’Évangile atteigne toute la terre. Le thème est « Que la terre entende sa voix ».
La conviction de John Stott
Stott est convaincu que Dieu appelle son peuple à se préoccuper de la société et de la politique aussi bien que de l’évangélisation. De nombreux participants à Lausanne étaient d’accord avec lui. Stott croit que la « Grande Commission » exige que les chrétiens soient attentifs aux besoins physiques et sociaux des gens, ainsi qu’à leurs besoins spirituels.
John Stott ne considère pas uniquement le commandement de Jésus « d’aller et de faire de toutes les nations des disciples », selon l’évangile de Matthieu, mais aussi le récit de Jean, lorsque Jésus dit à ses disciples : « Comme son Père l’avait envoyé, moi aussi je vous envoie. » Et tout comme la mission de Jésus a consisté à prendre soin du corps et de l’âme des gens, celle de l’Église doit l’être aussi.
Certes, la Déclaration de Lausanne reflète la vision de J. Stott, mais au fil du temps, il apparait que le Comité chargé de poursuivre le travail de Lausanne n’es pas tout à fait d’accord avec l’inclusion du ministère social dans ce texte. Stott a découvert que les leaders américains n’ont pas vraiment accepté le double accent formulé par la Déclaration : l’évangélisation et l’action sociale. Il est pourtant convaincu que le Mouvement de Lausanne doit se consacrer à l’action sociale ET à l’évangélisation.
1975 : première réunion du Comité directeur, Stott arrive à Mexico, il sait que la bataille sera rude.
La conviction de Billy Graham
Billy Graham prend la parole le premier soir. « Ce que je conseille, c’est de s’en tenir strictement à l’évangélisation et aux missions, tout en encourageant les autres à accomplir le travail spécialisé que Dieu a confié à l’Église. »
La confrontation
Stott reste éveillé plusieurs heures cette nuit-là, formulant sa réponse à la proposition de Graham. Au matin, il décide de confronter Graham, qui finance la réunion et le mouvement. Stott stupéfie tout le monde en déclarant qu’il démissionnerait du Comité si la vision de Graham pour le Mouvement l’emportait. Stott exige que l’accent placé dans la Déclaration de Lausanne sur les implications sociales de l’Évangile soit repris dans les travaux. Le Comité est choqué. De nombreuses personnes ne sont pas d’accord. Pour eux, les préoccupations sociales n’avaient occupé qu’un seul paragraphe de la Déclaration de Lausanne. Peur de temps avait été consacré à la discussion de ce point, durant le congrès. De nombreux Pour beaucoup d’évangéliques dans les années 70 répondre aux besoins physiques des gens était important, mais les sauver l’était beaucoup plus.
Comment ce désaccord a-t-il été résolu ?
Il ne l’a pas été. Pas totalement en tout cas. Voici ce qui s’est passé. Finalement, John Stott et Peter Wagner, professeur du Fuller Seminary qui voulait que Lausanne se concentre sur l’évangélisation, ont été enfermés seuls dans une pièce. Il leur a été demandé de trouver un compromis. On ne sait pas ce qu’il se sont dit ! Le résultat a été que la référence à « la mission biblique globale, holistique, de l’Église » a été prise en compte dans les travaux du Comité.
L’humilité de B. Graham clé de la résolution du différend
Graham veilla à ce que sa relation avec Stott ( ils étaient amis de longue date) ne soit pas rompu. Il lui écrira en avril : « Il n’y a pas d’homme que je respecte, que j’aime, que j’admire et que je suivrais volontiers avec plus de dévouement que je ne le ferais pour vous. » Le fait que Graham n’ait pas utilisé son énorme capital pour faire valoir son point de vue lors de la réunion de Mexico, est une marque d’humilité.
L’humilité, chemin de l’unité
Certains chrétiens s’empressent de défendre la bonne doctrine. C’est une bonne chose. Mais l’unité du corps du Christ fait-elle partie de ces doctrines que nous gardons jalousement ? L’unité de l’Église est l’un des objets de la mort du Christ (Eph 2 : 14). C’est surtout cela que le Nouveau Testament nous appelle à chérir et à défendre. Par conséquent, notre zèle pour la théologie ne doit jamais dépasser notre zèle pour nos frères et sœurs en Christ. Nous devons être marqués par l’amour. Nous devons, comme le dit toujours mon père, poursuivre à la fois la doctrine de l’Évangile et la culture de l’Évangile.
Dans le Nouveau Testament, l’humilité est le chemin de l’unité. Par exemple, l’exhortation de Paul aux Philippiens à « avoir les mêmes sentiments » (Phil 2 : 2) est suivie de son appel à « considérer, en toute humilité, les autres comme plus importants que vous » (Phil 2 : 3), en imitation de l’action du Christ à leur égard dans l’Évangile( Phil 2 : 5-11). Gavin Ortlund
Vérifiez votre attitude
En raison de notre propension à l’orgueil, il est facile de défendre la vérité de la mauvaise manière. Certes, Jésus (Matt. 23 : 1-33) et Paul (Actes 13 : 6-12 ; Gal. 1 : 6-9) ont tous deux fermement confronté ceux qui étaient dans l’erreur, ce qui peut parfois s’avérer nécessaire. Mais nous devons tenir compte de deux passages de l’Écriture qui nous guident dans la manière de corriger ceux qui sont dans l’erreur. Dans Galates 6 : 1, Paul écrit : « Frères, si quelqu’un est pris en faute, vous qui êtes spirituels, rétablissez-le dans un esprit de douceur, chacun en ce qui le concerne, afin que vous ne soyez pas tentés à votre tour ». La « faute » peut être une erreur doctrinale. Notre objectif doit être la restauration, et non de prouver que nous avons raison et qu’ils ont tort. Et nous devons agir avec douceur et humilité.
Dans 2 Timothée 2 : 24-26, Paul déclare : « Le serviteur du Seigneur ne doit pas être querelleur, mais il doit être bon envers tous, capable d’enseigner, patient quand on lui fait du tort, corrigeant avec douceur les opposants, afin que Dieu leur accorde la repentance qui conduit à la connaissance de la vérité, qu’ils reviennent à la raison et qu’ils échappent aux pièges du diable, après avoir été retenus par lui pour faire sa volonté ». Nous ne gagnerons pas une personne dans l’erreur à la vérité en étant querelleurs, impatients ou durs. Au contraire, nous devons gentiment et avec amour offrir une correction, tout en priant pour que Dieu accorde la repentance. Notre but ne doit jamais être de prouver que nous avons raison et que l’autre personne a tort. Notre désir doit plutôt être de glorifier Dieu en amenant l’autre personne à embrasser la vérité de Dieu. bible.org
Prière de conclusion
Seigneur, lorsque nous avons péché, soit en n’aimant pas la vérité, soit en n’aimant pas nos frères et sœurs dans nos désaccords sur la vérité, pardonne-nous et aide-nous. Pour ceux d’entre nous qui ont tendance à trop se disputer sur la théologie, aide-nous à nous rappeler que tu es aussi mort pour l’unité de l’Église, ta précieuse épouse. Donne-nous des cœurs plus doux. Pour ceux d’entre nous qui ont tendance à se battre trop peu pour la théologie, aide-nous à sentir notre besoin de courage et de résilience. Donne-nous des reins plus solides. Aide-nous à être des personnes qui tremblent devant ta parole et qui, en fin de compte, ne craignent personne d’autre que toi. Conduis-nous vers cet équilibre sain et heureux qui consiste à adhérer à tous tes enseignements tout en embrassant tout ton peuple. Amen. Gavin Ortlund
Pour aller plus loin :
Leaders : conjuguez conviction(s) et humilité !
Trois visions de l’humilité et leur mise en pratique