Fatigue compationnelle

Fatigue compassionnelle, suis-je concerné(e) ?

Trop de leaders sont à bout de force ou passent par un burn-out. La charge de responsable spirituel, de pasteur est exigeante. D’autant qu’il existe un aspect, dont ile me semble que l’on parle peu dans les milieux chrétiens. Alors que cet aspect est compris et pris en compte à propos des « aidants » ou dans milieux hospitaliers en particulier ; Fatigue compassionnelle, suis-je concerné ?

Le ministère de compassion de Jésus

Dans l’Évangile, il y a un mot qui n’est employé que pour le Seigneur Jésus. Ce mot, utilisé douze fois, est un terme très fort qui signifie « ressentir quelque chose dans ses entrailles», «être saisi aux tripes ». Le terme grec se rattache à un mot hébreu utilisé dans l’Ancien Testament pour décrire Yahvé.Dieu ressent jusque dans ses entrailles la souffrance de son peuple. C’est une expérience intime de la souffrance, une expérience maternelle, c’est la souffrance de la mère qui ressent la douleur de ses enfants jusqu’au plus intime d’elle-même. Dieu nous est révélé comme une mère qui ressent la souffrance de son peuple. Ce même mot revient dans le Nouveau Testament pour caractériser Jésus. Quand Jésus vit la foule sans nourriture, il ressentit la faim jusqu’au fond de lui-même. Quand il vit les aveugles et les lépreux, il ressentit leur lutte au plus intime de lui-même. Quand Jésus vit les paralytiques, il ressentit leur souffrance dans son cœur. Quand Jésus vit la veuve de Naïm quitter la ville avec son fils unique mort, il ressentit sa peine jusque dans ses entrailles, il tressaillit au plus profond de lui-même et fut remué jusqu’à la moelle. […] Des mots comme « il eut pitié», « il fut pris de compassion » sont faibles comparés au terme grec.

H. Nouwen Compassion, éditons Fidélité, 14 et 15

Fatigue compassionnelle : deux définitions

Dans le Dictionnaire des risques psychosociaux, (Le Seuil 2014 sous la direction de Philippe Zawieja et Franck Guarnieri), les auteurs proposent deux définitions. 

  • La première, enseignée dans les écoles de soins infirmiers : « Une conséquence négative du contact prolongé avec la souffrance d’autrui, à l’occasion de laquelle le soignant témoigne de symptômes tels que la colère, la dépression et l’apathie. » 
  • Et la seconde, plutôt utilisée par les psychologues : « Le sentiment d’épuisement physique et émotionnel que les professionnels de la relation d’aide sont susceptibles de développer au contact de la souffrance, au point que leur vision du monde et leurs croyances fondamentales en sont profondément et durablement ébranlées ». Mieux comprendre la fatigue compassionnelle

L’épuisement émotionnel…

L’épuisement émotionnel se caractérise par une perte d’énergie, un épuisement physique et psychique et une sensation d’être vidé nerveusement. La personne a perdu tout entrain, n’est plus motivée par son travail qui devient une corvée. Cette dimension est souvent liée au stress et à la dépression. Le manque de volonté et d’initiative (l’aboulie), l’incapacité à expérimenter le plaisir (l’anhédonie) et le manque de motivation ou d’enthousiasme (l’apathie) s’emparent de la personne. L’aboulie est un mot d’origine grecque qui signifie manque de volonté et diminution de l’énergie vitale. Dans l’usure professionnelle, elle est spécialement liée au travail. Ainsi, arriver sur le lieu de travail, l’hôpital, l’établissement scolaire, le bureau, ou l’entreprise devient une tâche titanesque.

A. Amada. Le burn-out des bons samaritains, éditons Nouvelle cité pages 23 et suivantes.

… a une dimension spirituelle

En effet, l’être humain n’est pas simplement un être de chair, mais il est aussi un être de chair spirituel, il n’est pas non plus qu’un esprit, mais il est un esprit incarné.

Sans cette vision spirituelle de l’homme on ne peut pas, il me semble, bien comprendre le phénomène du burn-out. En effet, la plupart du temps, la personne appelée à travailler dans des situations de tension émotionnelle n’est prise en compte que dans ses dimensions biologique, sociologique et psychologique. Et on néglige sa dimension spirituelle qui est souvent au cœur de son projet d’aide. Quand on réduit ainsi la personne, il est facile de conclure que le choix d’aider les autres est dû essentiellement à une distorsion cognitive de la toute-puissance idéaliste. Bien que cela puisse être possible, il y a aussi bien d’autres motivations. Quand on écoute ces hommes et ces femmes, on se rend vite compte que très souvent ce désir d’aider les autres remonte à leur enfance.

Ibid.

Évaluation personnelle

Tout d’abord, mettons-nous d’accord sur ce qu’est l’usure de la compassion. Il ne s’agit pas seulement d’un sentiment de fatigue ou d’épuisement émotionnel. L’usure de la compassion survient lorsque les exigences de la prise en charge des autres, qu’il s’agisse de conseils, de visites aux malades ou simplement d’une écoute attentive, deviennent si écrasantes qu’elles commencent à peser sur votre bien-être physique, émotionnel et spirituel. Il se peut que vous vous sentiez détaché, irritable ou que vous remettiez en question votre raison d’être dans le ministère.

Je vous propose de répondre au questionnaire séculier, largement répandu, réalisé par Christina Maslach, professeur de psychologie sociale à l’université de Berkeley en Californie. Comptez une vingtaine de minutes. Téléchargez le test ICI. Répondez aux questions sincèrement. Ne réfléchissez pas trop, soyez spontané et vrai. Sans vous bloquer. Ce questionnaire explore les trois aspects du syndrome : l’épuisement professionnel, la dépersonnalisation et le sentiment de perte de l’accomplissement personnel. Il n’y a pas de score global pour le burn out mais un score pour chacune des trois dimensions.

Osez placer des limites 

Rappelez-vous que même Jésus, l’exemple ultime de compassion et d’amour, a pris le temps de se soigner et de fixer des limites. Dans les Évangiles, nous voyons Jésus se retirer pour prier et se ressourcer, allant souvent dans un endroit calme pour passer du temps avec son Père.

De grand matin, comme il faisait encore sombre, Jésus se leva, quitta la maison et s’en alla dans un lieu solitaire, où il priait.

Marc 1 : 35.

Les personnes plus vulnérables sont celles qui ont des difficultés à se fixer des limites dans leurs relations avec les autres. Elles s’engagent volontiers à fond dans de nombreuses activités sans avoir vraiment pris conscience des conséquences concrètes de leurs engagements.

Ibid page 38.

N’ayez pas peur de fixer des limites saines dans votre ministère. Déléguez des tâches, dites non quand c’est nécessaire et cherchez le soutien de collègues pasteurs ou de conseillers. Vous ne pouvez pas verser de l’eau à partir d’une tasse vide, et prendre le temps de vous ressourcer fera de vous un berger plus efficace.

Réfléchir et se reconnecter

Il est facile de se laisser absorber par le quotidien des tâches pastorales et de perdre de vue son but et sa vocation. Tout comme les Israélites se sont souvent écartés du chemin tracé par Dieu, nous pouvons nous aussi nous retrouver spirituellement à la dérive. Prenez le temps de réfléchir à la raison pour laquelle vous êtes entré dans le ministère. Qu’est-ce qui vous a appelé à servir votre congrégation ?

Le Psaume 23 nous rappelle que le Seigneur est notre berger, et que nous ne manquerons de rien. Rappelez-vous que vous n’êtes qu’un récipient, un instrument de la grâce de Dieu. Il est le vrai berger, et vous êtes son fidèle serviteur. Lorsque vous vous reconnectez à votre vocation et que vous recherchez ses conseils, votre compassion sera renouvelée et vous trouverez la force de poursuivre votre ministère. Anonyme

Soyez accompagné

Portez les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi du Christ.

Galates 6 : 2.

Soyez accompagné(e) par vos collègues, pasteur ou leader spirituel, par un ami de confiance pour obtenir du soutien. Partagez vos luttes, vos doutes et vos craintes. Avec un mentor certainement ! Ne restez pas seul dans votre parcours. 

Permettez à d’autres de porter une partie du fardeau, vous allégerez non seulement le poids émotionnel, mais vous renforcerez également vos liens au sein de votre communauté de foi. N’oubliez pas que les personnes que vous servez ont besoin d’un berger en bonne santé et que le fait de chercher du soutien témoigne de votre foi et de votre humilité. L’usure de la compassion est un défi très réel dans votre ministère. Mais en suivant ces trois étapes bibliques – rendre soin de soi et se fixer des limites, -réfléchir et se reconnecter à sa vocation, et rechercher la communauté et le soutien – vous pouvez la combattre et continuer à servir votre congrégation avec amour et grâce.

Anonyme

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