L’intégrité : clé vitale de votre organisation

Ce blog à consacré plusieurs articles à l’intégrité personnelle. Je voudrais attirer votre attention sur la nécessité d’une intégrité organisationnelle. C’est à dire de l’intégrité de votre Église locale, de votre oeuvre, de votre association… Cet article s’adresse à vous qui êtes leaders spirituels, pasteurs, anciens, président, membre d’un comité…

Gouvernance et collégialité

L’expérience montre qu’il est important, pour une organisation, de veiller au respect de sa propre gouvernance. Églises locales, associations, missions ; l’assemblée générale générale est-elle devenue une « chambre d’enregistrement » ? Le conseil, d’administration – ou d’anciens, le « porte-parole » du pasteur ou du président ? Les instances dirigeantes sont destinées à éviter qu’un seul décide pour tous. Ce fonctionnement est mal sain, et générateur de frustrations qui ne manqueront pas de ressurgir lors d’une crise. Il peut aussi être responsable d’orientations malsaines, sous l’impulsion d’une seule personne. L’intégrité d’une organisation dépend du respect de ses propres instances, et de la pratique de la collégialité. Certaines, et non des moindres, conscientes de ce qu’affirme la Parole, se dotent même de conseillers extérieurs : « Comité de référence » « Comité théologique » suivant l’appellation… Un exemple à suivre.

…le salut réside dans un grand nombre de conseillers.

Proverbes 11 : 14

Accompagner le ou les leaders

Il faut être clair sur la mission spirituelle des conseils d’anciens, conseils d’administrations et autres comités : veiller sur les leaders spirituels. Voici ce qu’écrit mon amie et collègue le docteur Mary-Kate Morse

Il ne suffit pas d’interroger les pasteurs [leaders spirituels] sur leurs objectifs et leurs succès, sur leurs nouvelles initiatives et les nouveaux défis. Les conseils d’administration et les anciens, doivent prendre en compte la sainte obligation de se tenir aux côtés d’un dirigeant et pour s’assurer que son univers personnel, relationnel et spirituel est sain. Cela ne se découvre pas à travers un formulaire [ou un rapport]. Il faut de la réflexion, du temps et de la prière. Le pastorat et les ministères de direction sont parmi les vocations les plus difficiles, avec un stress élevé, un épuisement professionnel, des problèmes de mariage et de famille, des dépendances et des tentations sexuelles.

https://www.missioalliance.org/another-one-bites-the-dust-three-changes-the-church-needs-to-make/

Elle explique la raison d’être de cet accompagnement que doit offrir l’organisation par le lien de son instance dirigeante  :

Les dirigeants doivent se soucier davantage d’approfondir leur caractère que de diffuser leur message et de développer leurs églises ou organisations. Nous sommes appelés à être saints. Nous sommes appelés à faire passer les intérêts des autres avant les nôtres. Nous sommes appelés à être une offrande acceptable aux yeux de Dieu. Notre message est l’incarnation de notre ressemblance avec le Christ. Ce ne sont pas nos paroles. Si notre ressemblance avec le Christ s’effondre, nos paroles n’ont pas de valeur spirituelle. Elles seront interprétées à travers le feu de notre péché. […] Nous devons accepter l’appel de Dieu à vivre selon sa volonté et à marcher sur les traces du Christ. Nous devons vivre le genre de vie que Jésus a vécu, même si personne ne vous regarde. Nous devons obéir au commandement de Jacques 1:22 : « N’écoutez pas seulement la parole, et ne vous séduisez pas vous-mêmes. Faites ce qu’elle dit ». C’est simple, et c’est difficile. Et c’est tout ce que Dieu demande. Ibid

Ibid

Veiller les uns sur les autres 

Dans toute organisation chrétienne nous devrions exercer ce mentorat entre pairs, dont parle Mary-Kate. Nous offrir une protection mutuelle. Or j’entends souvent dire que les leaders spirituels ne peuvent pas être redevables ! C’est une erreur. J’ai été en contact avec les membres d’un conseil d’anciens qui avaient pris conscience des ravages de la pornographie dans leur Église locale. Conscients du fléau auquel ils devaient faire face, leur première réaction a été de se rendre redevables les uns aux autres, de leur propre abstinence de pornographie.

Les conseils d’administration et les anciens, doivent prendre en compte la sainte obligation de se tenir aux côtés d’un dirigeant et pour s’assurer que son univers personnel, relationnel et spirituel est sain.

Mary-Kate Morse

Les personnes ne sont pas des outils 

Toute organisation devrait veiller à ce que certains collaborateurs ne deviennent pas les « outils » du leader spirituel – ou de l’institution elle-même ! Ces personnes qui peuvent servir des années fidèlement, sans que quiconque se préoccupe du développement de leur ministère et de leur avenir. Je pense à ce directeur d’oeuvre qui s’est attaché les services fidèles d’une assistante durant plus de 10 ans, sans vraiment prévoir l’avenir de celle-ci, après son propre départ en retraite. Expérience violente pour elle ! C’est oublier que chacun est au service du Seigneur. Que le bien et le développement des collaborateurs doit être une préoccupation première de toute structure. (Je reviendrais sur cette question dans un article spécifique)

Vision vs outils

De plus en plus d’organisations travaillent en définissant leurs «  Mission – Vision – Valeurs » dans la prière et l’écoute de Dieu. Réflexion essentielle. Encore faut-il revisiter ces fondamentaux régulièrement, pour ne pas confondre l’outil et le projet. Et perdre la vision. Combien d’oeuvres, d’associations entretiennent, en s’épuisant, qui un journal, qui un évènement, qui un immeuble… qui ne répond plus à la mission ! Alors que d’autres outils, moyens, pourraient servir la même vision, avec les même valeurs,  et tellement mieux sans doute ! Un outil dépassé peut lui seul provoquer l’épuisement d’une organisation. 

Fidélité dans le petites choses

Un ami pilote d’avion, souligne que les crashs aériens résultent rarement d’évènements majeurs ou imprévisibles. Le plus souvent ils résultent de toutes petites choses qui, enchainées à d’autres erreurs minimes… vont se conjuguer pour conduire à la catastrophe. En leadership c’est pareil. Ce sont de petites négligences qui vont avoir de graves conséquences dans la marche de l’organisation. Qu’elles soient spirituelles, relationnelles, comptables, ou administratives… C’est précisément cela l’intégrité : ne pas négliger les petites choses. Un principe biblique :

Celui qui est fidèle dans les petites choses l’est aussi dans les grandes, et celui qui est malhonnête dans les petites choses l’est aussi dans les grandes

.Luc 16 : 10

L’orgueil organisationnelle

Dans une oeuvre chrétienne que je présidais, j’ai perçu que nous développions l’orgueil et l’auto-satisfaction par la comparaison de nos performances – à notre avantage bien sûr ! – avec celles d’autres œuvres, dans même domaine d’activité. Lors du comité suivant, j’ai souligné que nous entretenions cet orgueil institutionnel en nous ventant et en comparant notre succès. Une seule personne, dans l’équipe et le comité, a accepté ma remarque. J’ai dû faire face à l’indifférence générale, voir même un peu de mépris. Terrible… Des péchés de cet ordre peuvent ne jamais être réglés.

L’emprise familiale 

Dans de nombreuses associations, d’Églises, ou d’oeuvre, par facilité sans doute, mais aussi intentionnellement, figure dans l’assemblée générale, voire dans le comité de direction, les membres d’une même famille. En général celle du leader ou du pasteur. Quel danger que celui-là ! Celui de neutraliser toute redevabilité. Toute définition d’une orientation différente, d’une correction, devient impossible. Si un ou des membres de l’organe dirigeant, veulent affirmer une position différente du leader, c’est impossible. J’ai vu un comité directeur se faire renverser, lors d’un assemblée générale grâce aux voix captées à l’avance , – avec des arguments mensongers – d’une seule famille. On assiste dans certaine Églises des successions héréditaires qui n’ont rien de légitime.

L’équilibre oublié

Le Docteur Mary-Kate Morse pose une vraie question :

Pour beaucoup de gens (moi y compris), une vie qui compte semble signifier des réunions importantes avec des personnes importantes qui font des choses importantes Les femmes leaders doivent être au sommet. Une culture entièrement normée par les hommes deviendra toxique. Le Créateur nous a conçus pour que nous nous soutenions les uns les autres. Genèse 1 parle de l’identité et de l’autorité mutuelles de l’homme et de la femme. Genèse 2 décrit le rôle spécial des femmes pour protéger [aider] les hommes. […] Nous avons besoin les uns des autres. Ce bénéfice mutuel a été perdu à la chute et retrouvé à la résurrection. Pourtant, l’Église continue à promouvoir des leaders masculins qui n’ont pas cette couverture. […] Si votre Église ou votre organisation ne croit pas aux femmes dans le leadership, je suggère que le Saint-Esprit frappe à votre porte.

 Ibid

Le courage

Je suis fan de Paul Tournier. Je relis de temps en temps ses livres. Ce qu’il dit du manque de courage dans les couples, se produit de la même façon dans des organisations, Églises ou oeuvres.

Cela me rappelle un entretien avec Paul Ricœur. Il me demandait quelle était, à mon avis, la cause lointaine et profonde de tous les problèmes de vie qu’on m’apportait dans mon cabinet. J’ai répondu : le manque de courage. Sa réaction a été vive, il paraissait surpris et m’a lancé brusquement : « Donnez-moi un exemple ». Alors, à mon tour, je lui ai lancé le premier exemple qui me venait à l’esprit : voyez ces conflits conjugaux qui nous occupent tant, mes confrères et moi. A y regarder de près, on voit qu’ils étaient latents depuis des années, mais que les époux, au temps du bonheur amoureux n’ont pas eu le courage d’affronter un dialogue de vérité. Et tout à coup, ils sont tous les deux stupéfaits devant le torrent de griefs qu’ils se jettent l’un à l’autre quand cède la digue derrière laquelle ils les avaient refoulés. Ils s’étaient flattés de les retenir pour sauvegarder leur bonheur et leur amour, alors que c’était par manque de courage.

Paul Tournier Face à la souffrance, Labor et Fides 1982 page 148

Je dois avouer que s’il y a bien une chose que je regrette dans l’exercice de mon leadership dans mon ministère passé, c’est mon manque de courage ! Il ne sert à rien de dire après : « Si j’avais dit quelque chose ! Si j’avais osé.. » Il faillait avoir le courage de prendre position au moment où l’Esprit le montrait.

La « repentance institutionelle » 

À une autre occasion j’ai su faire preuve de courage. ! Et Dieu a béni ! Lors d’un grand événement à l’étranger, je me suis retrouvé propulsé directeur exécutif d’un très important festival d’évangélisation. Le comité d’organisation regroupait les pasteurs les plus connus du pays. La préparation avait été chaotique. Les tensions étaient à leur comble. Ces leaders ont commencé à s’accuser mutuellement avec virulence, en pleine réunion de comité. Je pensais à l’enjeu de l’évènement : l’évangélisation de toute une métropole engageant toutes les Églises locales. Le Seigneur m’a donné l’audace de reprendre ces frères réputés, de les exhorter à revenir sur leur propos. Après un temps de silence pesant, un premier s’est exprimé : «  Alain à raison… je demande vous pardon… » Une vague à fait le tour de la table et chacun s’est repenti. Nous avions retrouvé la liberté dans de Esprit  !

En exerçant mes responsabilités de président ou de leader, j’ai fait plusieurs expériences difficiles. Un conseil d’administration que je co-présidait avait développé la critique d’un partenaire international : « Ils sont dépassés par le problème… Ils ne maitrisent pas… Ils ont vu trop grand… Ils ne comprennent pas notre situation… » Sans beaucoup de bienveillance, et beaucoup de rouspétance à la française. Avec mon épouse nous nous sommes rendus à l’étranger pour travailler avec le partenaire en question. Une fois sur place, j’ai réalisé la maîtrise, le sérieux, la qualité spirituelle et technique développées par nos amis. J’ai été repris par le Seigneur. J’ai réalisé que notre comité avait critiqué ce partenaire dont nous ne soupçonnions ni les compétences ni les dispositions spirituelles. J’ai donc demandé pardon au directeur de notre partenaire, au nom de notre comité français. Cette demande, formulée à la veille d’un grand effort d’évangélisation a été apprécié et reçue et libératrice dans notre collaboration pour les 10 jours suivants.

Je pense ici à Daniel. Je crois que le leader est tout à fait qualifié pour se repentir pour son organisations. 

Je parlais encore, je priais, je reconnaissais mon péché et celui de mon peuple, d’Israël, et je présentais ma supplication à l’Eternel, mon Dieu,Je parlais encore, je priais, je reconnaissais mon péché et celui de mon peuple, d’Israël, et je présentais ma supplication à l’Éternel, mon Dieu. 

Daniel 9 : 20

De retour en France, lors de la rencontre suivante, j’ai expliqué ma démarche au conseil français. Ni ma remarque, ni ma démarche n’ont été approuvées par mes collègues.  Balayée d’un revers de main. Ce moment est resté gravé dans ma mémoire. Nous n’avions pas développé un leadership intègre en ne prenant pas position contre notre critique, en reconnaissant pas notre péché.  

Conclusion :

En tant que chrétiens, nous devons reconnaître que si le salut est un abandon, la sanctification est une guerre. Personne ne dérive vers la sainteté. Cette recherche de la sainteté commence dans notre vie privée, et pour nous, en tant que leaders qui servent d’exemples à l’Église, cela est de la plus haute importance. 

Rynan Hamm https://www.christianitytoday.com/biblestudies/articles/churchhomeleadership/leading-with-integrity.html

Personne ne dérive vers la sainteté

Les organisations non plus ! L’intégrité organisationnelle fait partie de cette recherche de sainteté. Elle glorifie Dieu. Elle encourage l’Église, pour laquelle elle est un modèle, et prévient la chute des leaders. 

Retour en haut