Suractivité des leaders

Et si la suractivité des leaders était une fuite et/ou, masquait une brèche ?

Vous avez observé que plus personne n’a le temps, nous sommes tous sur-occupés. Les leaders spirituels n’échappent pas à ce sur-fonctionnement. Au delà de l’aspect culturel, ou de l’évolution de notre monde contemporain, une question se pose : Et si la suractivité des leaders était une fuite et masquait une brèche ?

Ce n’est un secret pour personne, la culture contemporaine est imprégnée d’activisme. Pour chaque problème, nous devons faire quelque chose, et trouver la solution. Créer un programme, former un comité, prendre des mesures concrètes. Mais nous, leaders chrétiens, devons être enracinés dans l’être avant le faire. Thomas d’Aquin avait un punchline : l’action découle de l’être. Ce qui veut dire, que ce que nous faisons découle nécessairement de qui nous sommes. 

Ils ne peuvent pas s’arrêter

Peter Scazzero rapporte la réaction d’un ami psychologue clinicien, expérimenté dans l’accompagnement de leaders en difficulté :

Ils ne peuvent pas s’arrêter. S’ils s’arrêtent, ils vont mourir. Ils sont terrorisés. Ils sont morts de peur à l’idée de ce qu’ils vont découvrir en eux s’ils ralentissent. Et tu veux qu’ils se plongent dans des occupations comme passer du temps seul, vivre le sabbat et réfléchir dans le silence ? Tu ne peux pas imaginer à quel point tout ceci est loin des préoccupations des leaders qu’ils soient chrétiens ou pas. Quelque chose de bien plus profond les motive; ils n’ont tout simplement aucune idée de ce que c’est.

P. Scazzero Devenir un leader émotionnellement sain. Éditons Excelsis page 158

Servir Dieu oui…

Les [leaders] chrétiens ont certainement de bonnes raisons d’être occupés. Nous devons diriger des églises, participer à des groupes de maison, à des réunions de prière, porter des repas aux malades, collecter des fonds pour le toit de l’église, évangéliser dans la communauté, et tout cela en plus de tout ce que font nos amis non-chrétiens trop occupés. Comment pouvons-nous nous détacher de l’idée que le fait d’être occupé montre que nous sommes importants, que nous sommes nécessaires ou que, en termes chrétiens, Dieu nous utilise d’une manière merveilleuse qui ne laisse pas de temps pour se coucher tôt ou regarder la télévision en famille ? Certains pourraient penser que cela conduit à la passivité, à la négation de l’action. Mais c’est tout le contraire ! L’être est la condition préalable à l’action.

Claire Paye

Tout le malheur des hommes vient de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre.

Blaise Pascal

… Mais pour notre malheur ? 

La citation de Pascal est bien connue. Dans le contexte, le philosophe évoque la distraction comme remède à l’angoisse d’être face à face avec soi-même. Pour Pascal, la peur qui nous habite résulte la conscience de notre finitude. Nous sommes des êtres fragiles, nous mourrons tous, un jour ou l’autre, et cela nous pousse dans un paradoxe où l’on fuit sans arrêt la seule situation qui nous mettrait, pourtant, en sécurité : la solitude, dans notre chambre.

Mais il est aussi possible de suivre l’exemple de Pascal et d’embrasser ses peurs et ses pensées, […] de remonter au coeur du problème et d’affronter ces angoisses en cherchant à les comprendre ou à analyser nos ressentis. De cette manière, et en comprenant plus intelligemment notre monde et nos angoisses, nous tenterons d’être moins malheureux et de donner à notre vie et nos actions une signification plus élevée.

La pose Philo 

Et si notre suractivité dans le service du Seigneur résultait d’une peur d’être confronté à nous-mêmes, et à Dieu particulièrement ?

Quelles peurs peut cacher notre suractivité ?

Je parlais récemment avec un de mes mentorés de son hyper-activité et de la surcharge de son emploi du temps. Il m’expliquait combien il avait besoin d’être continuellement stimulé intellectuellement et spirituellement. « Lorsque je me rends au bureau en vélo, j’écoute des podcasts, j’en ai besoin ! » Je lui ai expliqué que lors de mes marches de prière en forêt, je me suis astreint à ne rien écouter, ni musique ni podcasts, ni même les lectures de la Parole de Dieu… pour être juste disponible face à Dieu et à moi-même. Mon interlocuteur dit : « C’est vrai, si je n’occupe pas mon cerveau, alors je dois faire face à la mélancolie, à des choses de mon passé, de mon histoire personnelle, auxquelles je n’ai pas trop envie d’être confronté. » Bouleversante confession ! Un peu plus tard, il a ajouté : « Je devrais peut-être ne plus écouter de podcasts sur mon trajet, quitte à faire face, un moment, à la mélancolie. »

Les trois brèches

Dans le livre Changer vraiment, comment ? T.S. Lane et P.D Tripp identifient trois brèches que nous tentons de combler par les « ismes » : activisme, légalisme, biblicisme, etc.

La brèche de notre identité

Premièrement, celle de l’identité. Beaucoup de chrétiens n’ont pas de vision spirituelle à ce sujet. Par exemple, Philippe était un bon théologien, mais son identité personnelle était davantage centrée sur sa connaissance et ses performances que sur l’Évangile. […] Souvent, dans notre aveuglement, nous assimilons nos problèmes à notre identité. […] Notre travail ne l’est pas non plus, même si le Seigneur l’a prévu pour nous.Trop d’entre nous fondent davantage leur identité sur leurs performances que sur la grâce de Dieu. Réussir dans le travail que Dieu vous a appelé à accomplir est merveilleux, mais si vous laissez votre succès définir ce que vous êtes, votre vision est faussée.

Lane & Tripp Comment changer vraiment ? Éditions MMI pages 15 à 18 

La brèche « ici et maintenant »    

Deuxièmement, la brèche « ici et maintenant » dans l’Évangile nous bouche les yeux sur la providence divine. Comme l’a dit Pierre, en Christ, nous avons reçu « tout ce qui contribue à la vie et à la piété ». Pourquoi, ici, emploie-t-il les termes « vie » et « piété» ? Le deuxième mot est destiné à qualifier le premier. Si Pierre s’était contenté d’affirmer que Dieu nous a donné tout ce dont nous avons besoin pour notre vie, il serait facile d’y ajouter le mot « éternelle ». C’est ainsi qu’on interprète souvent ce passage. Nous trouvons beaucoup plus simple de nous approprier la promesse de l’Évangile d’une vie après la mort que celle d’une vie avant la mort ! Mais lorsque Pierre nous dit que Dieu nous a donné tout ce dont nous avons besoin pour « la piété », nous savons qu’il nous parle de notre vie actuelle. […] Si nous n’avons pas conscience de la présence de Christ, nous avons tendance à vivre dans l’anxiété. Nous évitons les choses difficiles et nous nous laissons facilement décourager. Mais être au clair sur notre identité et sur la providence divine nous donne le courge d affronter les combats et les tentations qui jalonnent notre vie.

Ibid

La brèche de la compréhension de l’Évangile

Le Nouveau Testament exprime bien que notre acceptation dans la famille de Dieu n’est pas la finalité de l’œuvre divine en nous, mais le commencement. Dieu ne nous a pas appelés à vivre comme si nous avions touché le but et que nous attendions simplement d’aller au ciel. Au contraire, il nous pousse à travailler, à grandir, à avouer nos fautes et à nous repentir en permanence. Dieu veut nous sanctifier sans cesse jusqu’à ce que nous allions le rejoindre au ciel. Il fera tout ce qu’il faudra pour produire la sainteté en nous. Il veut que nous soyons une communauté joyeuse, mais il n’hésite pas à compromettre provisoirement notre quiétude pour nous faire ressembler davantage à Christ. Chaque fois que nous nous trouvons plongés dans les difficultés ou dans les épreuves, nous risquons de penser que Dieu nous a oubliés ou rejetés. En vérité, c’est parce que nous ne percevons pas le processus qui se déroule à ce moment. Le Seigneur ne travaille pas pour notre confort et nos aises, mais pour notre croissance. Alors même que nous sommes tentés de remettre en question sa fidélité, il accomplit ses promesses rédemptrices pour nous. Après tout, nous ne sommes pas les seuls à devoir changer. Il s’agit d’une norme universelle, et Dieu ne cesse pas d’agir pour accomplir ce processus en nous.

Ibid.

Ce qui remplit notre esprit finit par remplir notre cœur

Si votre activité, même pour Dieu, remplit vos pensées, si vous n’avez pas de vrais moments de silence, d’écoute, de contemplation, comment allez-vous favoriser votre propre transformation à l’image de Christ ? Comment allez-vous discerner ce que l’Esprit attend véritablement de vous et qui n’est pas le fruit de votre besoin d’action ? Comment allez-vous faire face à vos angles morts, à vos failles, vos brèches ? Nous oublions si facilement que :

Le cœur est tortueux plus que tout, et il est incurable. Qui peut le connaître ? 

Jérémie 17 : 9 S21. 

Comme le dit D.A. Carson, « Les gens ne dérivent pas vers la sainteté … Nous dérivons vers la désobéissance ». Cela signifie que nous ne dérivons pas vers le fait de passer du temps avec Dieu.

De la difficulté d’être seul face à soi-même

Nous nous surprenons en train de nous fuir nous-mêmes et nous n’aimons pas être seuls. […] Dans le silence, je m’efforce d’être présente à moi)même. Qui s’y emploie découvre d’abord ce qui n’est pas agréable. […] Fréquemment, les premiers instants de silence nous dévoilent un désordre intérieur, c’est la confusion de nos pensées et de nos désirs. […] Le silence est comme un catalyseur de notre état ; nous n’avons pas d’illusions : nous voyons la réalité. […] Le silence assure la distance envers soi-même. Dans les premiers instants, on a tendance à toujours rechercher la faute chez autrui et à se sentir traité injustement. Il faut d’abord un temps de silence, pour de nouveau se voir soi-même d’une façon plus évidente.

Anselme Grün Apprendre à faire silence, Éditions DDB, pages 20 & 21.

Dieu désire notre coeur avant notre service pour lui

Lane et Tripp parlent d’une bataille ultime, celle pour les pensées et les motivations de notre cœur.

Toutes les références de la Bible à l’homme intérieur (esprit, émotions, intellect, âme, volonté, etc.) sont résumées en un mot : le cœur. Celui-ci est le gouvernail de chaque être humain. Tout ce que nous faisons est façonné et contrôlé par les désirs de notre cœur.C’est pourquoi la Bible insiste tant sur le fait que Dieu veut notre cœur. C’est seulement lorsque Dieu a conquis celui-ci que vous lui appartenez. Même si nous sommes affectés par notre monde brisé et par les péchés des autres contre nous, notre plus grand problème est le péché qui réside dans notre cœur. C’est pourquoi le message de l’Évangile, c’est que Dieu transforme notre vie en changeant notre cœur. Des changements durables proviennent toujours du cœur. C’est l’un des thèmes les plus développés dans les Écritures, mais beaucoup d’entre nous ne réalisent pas ses profondes implications. Nous avons besoin de comprendre Proverbes 4.23 : « Garde ton cœur plus que toute autre chose, car de lui viennent les sources de la vie. » Ibid pages 30 & 31.

Ibid pages 30 & 31.

Lisez aussi :

À toi qui ne sais pas t’arrêter !

Kit de survie spirituelle pour vos folles journées !

Vous avez besoin de silence plus que vous ne l’imaginez !

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