Harry Stamp

C’était mon grand-père !

Harry Stamp, mon grand-père, dessiné par son fils Ruben, mon père.

Récemment j’ai été invité à un anniversaire par des amis. Je fais la connaissance de l’un de leur ami, qui a eu des responsabilités dans plusieurs pays d’Afrique. La discussion roule sur des sujets intéressants. Tout à coup ces deux questions …

– Pourquoi êtes-vous devenu pasteur[2] ? Quelles ont été vos influences ? Vos parents, vos grands-parents ?

Je suis étonné par cette question pertinente… Qui nous permet d’échanger sur les influences qui nous construisent tous. 

– Mes parents ne sont pas croyants !

[ Encore que… je ne peux pas entrer dans les détails qui suivent avec mon interlocuteur. Mon père s’est fait baptiser à 18 ans sur la plage à Saint-Brieuc. Plus tard, il a fait une année à l’Institut Biblique de Nogent-sur-Marne, juste avant la guerre, d’où il est en revenu clairement agnostique : « À cause de ce que j’ai vu et vécu ! » J’ai rencontré des années plus tard, un vieux pasteur suisse qui avant été camarade de chambre de mon père à l’Institut Biblique de Nogent. Il qui m’a dit : « Ton père avait des problèmes existentiels lorsque nous étions à l’IBN ». Quand à ma mère je suis certain qu’elle a été en contact avec l’Évangile, puisque sa propre mère était croyante. C’est d’ailleurs l’origine de sa révolte permanente contre Dieu. Ma grand-mère est décédée d’un flegmon dans la gorges alors que ma mère avait 15 ans. Ma grand’mère, exprimant sa foi en la vie éternelle a dit à ses enfants : « Ne pleurez pas, je pars rejoindre le Seigneur ! » Ma mère m’a raconté que sa réaction a été : « Comment peut-on dire à ses enfants qu’on laisse orphelins : Ne pleurez pas, je pars rejoindre le Seigneur ! »] 

– Mais oui : trois de mes grands-parents étaient des croyants convaincus.  Sans parler de mon arrière-grand-père paternel, c’est une autre histoire… Mieux encore, mon grand-père, Harry Stamp, était d’origine anglaise. Il est venu en France, célibataire, pour évangéliser !

Et me voilà à expliquer – et à reconsidérer une nouvelle fois-, l’héritage spirituel de mes grand-parents.

L’histoire de mon grand-père

Voici ce qu’on peut lire sous la plume de S. Fath[3] ;

Du fait de son caractère particulier et particulariste, l’Église Baptiste du Tabernacle -à Paris- comptaient plusieurs membres non parisiens, qui s’attachèrent, là où ils se trouvaient, à diffuser l’Évangile. C’est ainsi qu’en Bretagne, parallèlement au travail déjà effectué, depuis 1919, à Paimpol. Cette œuvre fut encadrée jusqu’à la guerre par le Tabernacle. 

[…] A Saint-Brieuc, en Bretagne c’est une véritable petit église que se forma chez nos amis M. et Mme Stamp, qui construisirent une salle où il virent chaque dimanche de 40 à 50 personnes assister au culte. Il y eut des conversions remarquables. Ce groupe ne demanda pour se développer qu’un conducteur qualifié que nous eûmes en 1939.

Et S. Fath ajoute cette note : 

Il s’agit de M. et Mme Stamp qui construisirent la salle de culte et l’équipèrent. Elle fut inaugurée en octobre 1930. Dans un rapport dactylographié de 1931n M. Blocher Saillens fait déjà état à Saint-Brieuc de vingt conversions. […] Le « conducteur qualifié » en question fut le pasteur F. Piaget, d’origine suisse.[4]

J’ai un souvenir particulier de mon grand-père. Grand, portant une couronne de cheveux blancs mi- longs, qu’il coupait souvent lui-même aux ciseaux, toujours en costume trois pièces, chaussé de brodequins. Sa voix grave, son accent anglais rocailleux… et son incapacité à différencier le tu du vous, m’impressionnaient. Depuis aussi longtemps que je m’en souvienne, mon grand-père avait une habitude particulière qui me mettait profondément mal à l’aise. Chaque fois qu’il séjournait chez nous, il nous invitait, chacun à notre tour, mes sœurs et moi, dans sa chambre. Il nous lisait un passage biblique – auquel je ne comprenais rien ! – puis mettait un genou à terre et priait longuement pour nous ! Sans doute percevais-je solennité de l’instant. Mais je n’aimais pas ces moments, ne sachant pas quelle attitude adopter, ni quoi en penser.

Ce n’est que bien plus tard que j’ai compris la bénédiction que représente des proches qui prient et intercèdent pour soi. Dans quelle mesure suis-je le fruit de l’intercession de mes grands-parents – et d’autres sans doute ? Suis-je la réponse de Dieu à toutes  ces prières ? Ce qui serait une démonstration que Dieu écoute et répond ? Mesurons -nous la bénédiction spirituelle que sont ces personnes fidèles qui ont persévéré une partie de leur vie pour nous ? Un élément de réponse figure dans une biographie des mes grands-parents rédigée par une des mes tantes. À la fin de ce récit, on peut lire :

Cependant la troisième et grande ambition de Harry, celle d’avoir un fils qui œuvrât parmi les jeunes français, s’était indirectement réalisé. Son petit-fils, Alain, fils de Ruben, travaillait régulièrement parmi les enfants, et depuis quelques années, et il allait devenir bientôt évangélistes à plein temps.

Merci grand-père, Dieu m’a fait la grâce d’être la réalisation de ton noble désir. Ce désir que tu as, avec grand’mère, porté avec fidélité pendant tant d’années. Je ne l’ai pas su, mais aujourd’hui je le comprends. Soli Deo Gloria !


[2]Je me présente comme pasteur, argument sociologique.

[3] Une autre manière d’être chrétien en France S. Fath Labor et Fidès, pages 394

[4]Il devint mon oncle en épousant ma tante, Isabella ! 

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