À temps plein ? Restez vigilants !

Si l’on prend bien soin de se préparer en amont avant d’entrer dans le ministère pour Dieu, ne faut-il pas veiller sur sa vie spirituelle tout du long ?  L’objectif est de terminer la course, selon l’expression de l’apôtre Paul. Léa vous encourage : À temps plein ? Restez vigilants ! Et à long terme !

Léa Rychen est rédactrice en chef de imagoDei. Créatrice de contenus, elle est passionnée par les interactions entre la culture, la foi et les croyances. Forte de sa formation en arts et humanités, elle aime écrire et réfléchir et produit des articles, des chroniques radio, des conférences et des podcasts. Léa à étudié la théologie et l’apologétique à Oxford. Elle continue désormais sa formation à la Faculté de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine.

Enthousiasme et zèle

Je me souviens très bien quand j’ai commencé à envisager travailler à plein temps dans « le ministère ». J’étais une jeune chrétienne, en fin d’adolescence, issue d’une famille non croyante. J’avais découvert l’Évangile de façon assez radicale et m’étais rapidement passionnée par la Bible, l’Église, la vie chrétienne et l’évangélisation. À cette époque, enthousiaste comme j’étais, il était facile de passer des heures dans la Parole de Dieu et dans la prière ! J’avais une telle soif de connaître Jésus et de le faire connaître. En réfléchissant à mon avenir, j’en étais arrivée à la conclusion que, si je travaillais pour Dieu à plein temps, je serais nécessairement immergée dans sa Parole et sa présence et, en prime, j’aurais toujours l’opportunité de faire de l’évangélisation. Tout bénef, donc ! Ou du moins, c’est ce que je croyais. 

Tu travailles à plein temps pour Dieu. Tu as le devoir et la responsabilité de soigner le temps que tu passes avec lui, dans sa présence, dans sa parole, dans la prière. C’est un devoir est une responsabilité, mais c’est aussi une grâce. 

Parole de sagesse d’une amie.

Face à la réalité

J’ai ensuite découvert la réalité du ministère (1). J’ai commencé à travailler pour une œuvre missionnaire pionnière et, sur le papier, tout était parfait : une équipe superbe, des projets superbes, et une convergence entre les besoins et mes compétences. J’avais conscience de mon crucial besoin de Dieu. Je ne voulais pas devenir une technicienne du ministère (c’est-à-dire, enchaîner les tâches de façon technique) mais bien rester dans le service de Dieu et de son Évangile. Pour cela, je comprenais bien que les disciplines spirituelles étaient nécessaires, tant pour ma vie personnelle que professionnelle.

De la théorie à la pratique

Sauf que voilà : il y a la théorie et la pratique. En théorie, surtout si l’on fréquente une église évangélique, on est bien au fait de l’importance de lire la Bible et prier quotidiennement (2). En pratique, en revanche, il existe toujours mille milliards de raisons de faire mille milliards de petites choses autres que de se plonger dans la Bible et prier. Et, contrairement à ce que pensait la jeune adolescente enthousiaste et zélée que j’étais, c’est le cas aussi pour les leaders spirituels.

Quand quotidien et fatigue s’installent

Mes premières tâches du ministère ont consisté à mettre des annonces sur Leboncoin pour bazarder des vieilleries et commander de la bureautique pour aménager l’espace de travail. Puis, des tâches administratives se sont rajoutées : gérer des courriels, gérer des réunions, organiser des sessions de travail en recherchant des billets de train et des restaurants. Puis, les projets se sont développés, l’équipe s’est étoffée, et mon travail a consisté de plus en plus à créer des Doodles, organiser le Drive et faire des comptes-rendus de réunion. Pour ces petites tâches-là, pas besoin de passer une heure dans la Bible pour y chercher une direction spirituelle, non ?

Les petites tâches logistiques ne semblent pas intrinsèquement spirituelles. On peut les faire sans trop réfléchir, sans trop s’impliquer spirituellement parlant. Le problème, c’est qu’il arrive que ces tâches prennent de plus en plus de place. Il y a des jours voire des semaines entières sans avoir à rédiger une prédication ou un message d’évangélisation. Le côté technique des courriels et des Doodles et des comptes-rendus occulte le côté spirituel. Et progressivement, si je ne fais pas attention, je peux finir par oublier la nature spirituelle de mon travail et, pire, oublier l’importance de prendre soin de ma vie spirituelle.

Ce que tu vis est un privilège. La plupart des chrétiens peuvent vivre leur foi en souterrain, toi pas. C’est difficile, mais merveilleux à la fois. 

Parole de sagesse d’une amie.

Bien sûr, il y a là un cercle vicieux : si je prends l’habitude de ne pas venir à Dieu – parce que je suis fatiguée, parce que j’ai beaucoup trop de choses à faire, parce que [complétez la phrase] – eh bien, je vais m’habituer à ne pas venir à Dieu. Cela va devenir normal, voire facile, de dépendre uniquement de mes propres forces : pour ma vie personnelle, pour mon ministère. Et le jour où je devrai préparer une prédication ou donner un message d’évangélisation, j’aurai tellement pris l’habitude de travailler sans Dieu que, sans même m’en rendre compte, je vais sauter la case « Bible » et « prière » (et devenir une simple technicienne)…

Tu n’es pas une cartographe qui doit pouvoir tout savoir et expliquer : tu es une coureuse de forêt. Tu dois constamment chercher la destination, certes, mais tu pratiques la course. 

Parole de sagesse d’un collègue

Dans les Évangiles, il n’y a pas que le péché qui encrasse nos cœurs : l’amertume, la colère, les incompréhensions, les frustrations, les émotions normales du quotidien, tout ça vient petit à petit se coller à nous et nous encrasser de l’intérieur. Si on perd l’habitude de venir à Dieu, on perdra l’habitude de laisser Dieu changer notre regard et transformer ; de laisser le Saint-Esprit nous alerter sur les petits riens qui nous éloignent de lui. 

Nettoyer mon peigne

Vous savez, j’ai chez moi un joli peigne que j’ai hérité de ma mère. Je l’utilise presque quotidiennement, et le trouve vraiment agréable et efficace. Cependant, très régulièrement, je remarque qu’il y a de la saleté qui s’encrasse entre les dents du peigne : il fonctionne toujours aussi bien, mais il laisse derrière lui des micro-saletés presque invisibles qui, au final, salissent mes cheveux et ma trousse de toilette. Or, l’important ce n’est pas seulement qu’il continue de brosser, mais qu’il ne laisse pas partout des impuretés ! Sans le temps que je passe avec Dieu, je finirai vraiment à ressembler à ce peigne : fonctionnelle, peut-être, mais qui laisse passer des impuretés… Est-ce que c’est comme ça que j’ai envie de servir Dieu ?

Quand discipline et joie convergent

Aujourd’hui, j’écris cet article avant tout à moi-même. Je réalise l’importance de veiller sur ma vie spirituelle, car je ne peux amener les gens là où je ne suis moi-même allée (3). Je comprends que, comme tout chrétien, il est malheureusement facile de s’éloigner de cette volonté de Dieu que nous soyons toujours en communion avec lui, et que nous diminuions afin de le laisser croître (Jean 3:30.)  En tant que leader spirituelle, à moi de me rappeler que:

 Si l’Éternel ne bâtit la maison, Ceux qui la bâtissent travaillent en vain ; Si l’Éternel ne garde la ville, Celui qui la garde veille en vain. En vain vous levez-vous matin, vous couchez-vous tard, Et mangez-vous le pain de douleur ; Il en donne autant à ses bien-aimés pendant leur sommeil.

Psaume 127:1-2.

 À moi de me souvenir que sans Dieu, mon ministère est vain et que j’ai besoin de lui, même pour des choses toute bêtes comme aménager un bureau ou gérer des courriels. Parce que, quoi que je fasse, je veux le faire pour la gloire de Dieu.

… quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu.

1 Cor 10 : 31. 

Continuer à se former

Je vois aussi combien il est précieux, dans la mesure du possible, de s’engager à continuer les études de théologie. Cela permet de rester étudiant à l’école de Dieu, de maintenir une posture d’humilité dans la certitude de ne pas tout savoir et d’avoir continuellement besoin d’apprendre. Enfin, et c’est mon espérance, cela permet de garder un regard frais et neuf sur la Bible (pour avoir la joie d’y retourner jour après jour !) et sur la réalité du  ministère  – ce service auquel Dieu m’appelle.

Seulement si je prends soin de ma vie spirituelle puis-je espérer courir la course, et arriver au bout…

 1 – Le terme « ministère » est emprunté au latin ministerium qui signifie : « fonction de serviteur, service », « serviteur », « office, aide, assistance ». Au pluriel, il désigne traditionnellement « les différents services ou départements établis auprès des empereurs ». Au sein du christianisme, il a fini par décrire le « service de Dieu », tel que décrit par exemple dans la liste de Paul en Ehpésiens 4:11.

  2 – Et même « sans cesse », comme le rappelle Paul (1 Thessaloniciens 5:17) !

3 –  Voir La croissance du leader de Bobby Clinton aux éditions BLF : une mine d’or pour prendre conscience du rôle et des responsabilités du leader spirituels ! 

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