J’ai adapté, avec la permission de l’auteur, un article de Rich Vilodas, paru sur le blog de Missio Alliance, en supprimant les références liées au contexte des USA.
Dietrich Bonhoeffer, en 1934, après qu’Hitler ait fait tuer par ses troupes SS plus de 200 personnes qui s’opposaient au parti nazi, Bonhoeffer se leva pour donner un message. Il a surpris sa communauté en les exhortant à « ne pas juger mais à se repentir », en se référant aux mots de Jésus dans Luc 13:1-5.
Dans une lettre qu’il a écrite à son ami Erwin Sutz, il a précisé :
C’est nous qui devons nous convertir, pas Hitler.
Le fiasco de certains « leaders vedette » devrait nous amener à réfléchir à un certain nombre de questions concernant le pastorat, la formation de disciples et le leadership. Nous devons nous repentir de la manière dont nos âmes ne sont pas soignées et nourries dans la vérité. Nous devons nous repentir d’avoir établi des cultures d’Églises où la soumission mutuelle et une autorité sainte ne sont pas pratiquées. Nous devons nous repentir de la culture omniprésente et dysfonctionnelle de pasteurs célèbres qui domine une grande partie du monde évangélique, pentecôtiste et charismatique. Nous devons nous repentir.
Dans mes propres réflexions, je suis revenu à des questions qui m’ont rappelé mon propre côté obscur et mon besoin de grâce. Voici quelques questions que je me suis posées
1. Est-ce que je vis dans la vérité, en tant que pasteur, y-a-t-il des domaines où je manque d’intégrité ?
L’intégrité ne consiste pas à vivre quelque chose parfaitement, mais à lutter contre, ou pour, quelque chose fidèlement. En tant que pasteurs et leaders spirituels il n’y a pas d’alternative pour dénoncer honnêtement les mensonges et les illusions qui déforment nos vies. Est-ce que j’ai vraiment une vie de prière ? Est-ce que je m’enracine dans des pratiques qui me fondent dans l’amour de Dieu ? Est-ce que ma vie avec Dieu est une vie de confession et de repentance ? Comme l’a dit Ron Rolheiser :
Nous ne sommes jamais aussi bien portant que lorsque nous confessons nos péchés.
2. Ai-je des amitiés qui m’aident à affronter mon côté obscur ?
Est-ce que nous avons des amis qui nous disent la vérité avec amour ? Est-ce que nous prenons le temps d’établir des relations spirituelles qui nous fournissent le contexte pour notre repentance ?
En fin 2017, j’ai réalisé que l’attrait du leadership pour l’isolement grandissait en moi. J’ai beaucoup d’amitié, mais je savais que j’avais besoin d’espace pour lutter contre les défis et les tentations liés au pouvoir. Une fois par mois j’ai une rencontre vidéo avec quelques amis (qui sont aussi pasteurs). J’ai besoin de toute l’aide que je peux obtenir.
3. Est-ce que je me soumets à l’autorité volontairement, avec joie et transparence ?
Je mentirai si je vous dis que je le fais avec joie. Je n’aime pas qu’on me dise quoi faire. Je veux prendre les commandes. Je veux informer les autres et non leur demander leur permission. Pourtant, cela a été l’une des garanties les plus importantes pour mon leadership et ma vie de pasteur. Je suis reconnaissant de rendre compte à un conseil d’anciens qui me pose des questions difficiles chaque mois. Je leur suis reconnaissant de ne pas être “impressionnés” par moi. L’année dernière, j’ai considérablement mûrit dans ma relation avec le conseil d’administration. Aujourd’hui encore, me soumettre à une autorité de manière saine est un combat pour moi. Mon faux moi est exposé. Mon perfectionnisme est clairement dévoilé. Pourtant, au fond de moi, je sais que Dieu me protège.
4. Quelles sont les limites (temps, énergie, puissance, argent) que je suis actuellement en train de franchir ?
Nos âmes sont en danger quand nous dépassons nos limites. On pourrait même dire que c’est l’essence du péché, comme on le voit dans le jardin d’Éden. Dieu a posé une limite et l’homme l’a volontairement et consciemment franchie. Chaque fois que nous franchissons nos limites, nous entrons sur le territoire de Satan. Quelles sont les limites que nous franchissons ? Travaillons-nous sans arrêt ? Gérons-nous nous mal l’argent ? Abusons-nous de notre pouvoir ? Prenons-nous la place de Dieu ? Respectons-nous le sabbat ? Jouons-nous avec nos enfants ? Avons-nous une vie en dehors de du « travail que nous accomplissons à l’église ? »
5. En tant que pasteur, quels « droits » est-ce que je pense avoir ?
Lorsque je suis devenu pasteur à New Life Fellowship, mon prédécesseur Pete Scazzero m’a dit :
– Félicitations, tu ne pourras plus te garer sur le parking de l’église !
J’ai été choqué. Est-ce que les pasteurs ne devraient pas avoir une place de parking ? Dans le Queens, à New-York, nous avons un très petit parking même s’il est énorme selon les standards de la ville. Mais le question culturelle émerge clairement ici. En tant que pasteur n’ai-je droit pas droit à un traitement spécial ? J’ai été appelé pour diriger ma communauté en la servant. Il existe aussi un autre extrême où les pasteurs ne sont pas suffisamment soignés, encouragés et soutenus, mais au cœur de cette question se trouve ces droit que je pense avoir.
6. Ai-je des temps d’accompagnement pour apprendre à me connaître ?
La thérapie est un don. Je l’ai constaté au cours de mes dix années de ministère pastoral à New Life. Lorsque je suis devenu membre du personnel, j’ai fait faire une évaluation psychologique, qui a révélé un manque d’empathie nécessitant un travail important. Dans le cadre de ma règle de vie pastorale, il m’a été demandé d’apprendre à mieux me connaître, en profitant de l’expertise professionnelle de sages thérapeutes. J’ai la conviction que chaque pasteur à besoin de périodes de thérapie. L’image de nous projetons, celle que nous recevons, le pouvoir dont nous pouvons disposer et le stress que nous portons régulièrement, exigent des rythmes de croissance de la conscience de soi, de peur que nous n’abusions de notre pouvoir.
7. Marié, est-ce que mon conjoint a le droit de partager avec les responsables de mon Église comment les choses se vivent à la maison ?
En tant que pasteurs et leaders mariés, nous sommes appelés à diriger à partir de notre mariage. De plus, en tant que dirigeants chrétiens mariés, l’objectif d’un bon mariage n’est pas de maintenir une base pour le ministère. Le mariage doit être la base d’une vie enracinée dans une alliance d’amour profond et intime, à partir duquel nous sommes formés par Dieu, et à partir duquel nous conduisons les autres.
Une façon de repérer les zones de croissance et de guérison est d’inviter notre conjoint, ceux qui nous connaissent le mieux, à donner honnêtement leur avis sur la façon dont les choses se passent à la maison. Nous ne sommes pas des PDG. Notre vie familiale ne peut pas être dissociée de notre « vie d’église ». Une façon d’aller vers la plénitude est de créer un espace pour ce genre de conversations.
Certes, de nombreuses autres questions doivent être résolues, mais selon les termes de Bonhoeffer, c’est nous qui devons nous convertir.